Le syndrome de Stevens-Johnson est une réaction allergique grave provoquée par une prise médicamenteuse, et responsable d'une éruption cutanée bulleuse diffuse. Voici ce qu'il faut savoir sur cette pathologie.
Syndrome de Stevens-Johnson : ses caractéristiques
Définition du syndrome de Stevens-Johnson
Le syndrome de Stevens-Johnson est une réaction allergique grave et rare qui, avec le syndrome de Lyell, constitue une maladie unique désignée sous le terme de nécrolyse épidermique.
Elle constitue son stade le moins sévère alors que le syndrome de Lyell désigne sa forme grave. Elle sont définies en fonction du degré d'extension de l'éruption cutanée, le syndrome de Stevens-Johnson pouvant rester limité ou évoluer vers un syndrome de Lyell.
À propos de la nécrolyse épidermique
La nécrolyse épidermique est une atteinte touchant 2 cas par million de personnes par an. En France, cela concerne environ 120 personnes par an. Survenant à tout âge, elle est toutefois plus rare chez l'enfant, le risque étant plus important chez les femmes et augmentant après 40 ans.
Il s'agit de la destruction brutale, par nécrose, de la couche superficielle de la peau (épiderme) et des muqueuses (épithélium), entraînant son détachement avec la formation de bulles cutanées et d'érosions muqueuses.
Le pronostic est grave avec 5 à 10 % de mortalité pour le syndrome de Stevens-Johnson (jusqu'à 20-25 % pour le syndrome de Lyell) et de fréquentes séquelles cutanées et oculaires.
Syndrome de Stevens-Johnson et syndrome de Lyell
Le syndrome de Stevens-Johnson désigne une atteinte limitée à moins de 10 % de la surface corporelle, alors qu'on parle d'un syndrome de Lyell lorsque plus de 30 % de la surface corporelle est touchée.
Entre les deux formes, il existe une zone de transition qui correspond à une atteinte de 10 à 30 % de la surface du corps.
Les causes du syndrome de Stevens-Johnson
Le mécanisme est mal connu et ferait intervenir le phénomène d'apoptose (mort cellulaire programmée) des cellules de l'épithélium de la peau et des muqueuses du fait d'une réaction immunitaire inappropriée.
La cause la plus habituelle est une prise médicamenteuse, certains médicaments étant reconnus comme à haut risque :
- sulfamides anti-infectieux et autres antibiotiques (aminopénicilline, fluoroquinolones, céphalosporines) ;
- allopurinol ;
- certains anti-épileptiques anticonvulsivants comme la lamotrigine (Lamictal® et génériques), le risque étant augmenté en cas d’association à l’acide valproïque ou ses dérivés ;
- certains antiviraux ;
- anti-inflammatoires non stéroïdiens dérivés de l'oxicam ;
- certains psychotropes tels que l’étifoxine (Stresam®) ;
- antidépresseurs comme l’agomélatine (Valdoxan®).
Certains cas sont reliés à une cause infectieuse, en particulier par un germe responsable de pneumonies atypiques (Mycoplasma pneumoniae). Des cas ont été rapportés suite à une vaccination.
Parfois, aucune cause n'est retrouvée. Certains facteurs augmentent le risque de survenue de la nécrolyse épidermique, comme l'infection par le VIH, la greffe de moelle osseuse, certaines maladies inflammatoires, le cancer et la radiothérapie.
Symptômes du syndrome de Stevens-Johnson
Le syndrome de Stevens-Johnson débute 1 à 3 semaines après la prise médicamenteuse. Les premiers symptômes miment une infection virale : fièvre, malaise, céphalées, toux, conjonctivite.
Puis, des macules (taches rouges en relief) apparaissent sur le visage, le cou, et sur la partie supérieure du tronc. L'éruption cutanée s'étend rapidement à toute la surface du corps, prédominant sur le tronc et la racine des membres. Les macules se recouvrent de bulles qui fusionnent entre elles, puis se décollent, laissant place au derme rouge, douloureux et suintant.
Des érosions muqueuses siègent au niveau de la bouche, des yeux, des organes génitaux et de l'anus, mais elles peuvent aussi affecter les voies respiratoires. Les érosions sont douloureuses et empêchent l'alimentation, entraînent une intolérance à la lumière (photophobie) ou encore des brûlures mictionnelles.
Les complications du syndrome de Stevens-Johnson
Les complications sont comparables à celles retrouvées chez les grands brûlés, la peau n'assurant plus ses fonctions de protection :
- pertes liquidiennes importantes conduisant à une déshydratation par perte d'eau et d'électrolytes, avec risque d'insuffisance rénale et de défaillance cardiaque ;
- infection grave ;
- trouble de la régulation de la température corporelle ;
- anomalies immunitaires.
Les atteintes muqueuses diffuses sont particulièrement redoutables. L'atteinte de la trachée et des bronches peut conduire à des complications respiratoires (infection pulmonaire, œdème pulmonaire). Sur le plan digestif, elle peut entraîner de graves érosions muqueuses ou des colites pseudo-membraneuses.
Syndrome de Stevens-Johnson : diagnostic et traitement
Le diagnostic est avant tout clinique devant la symptomatologie évocatrice, mais souvent il est confirmé par une biopsie cutanée qui permet d'apporter la preuve de l'atteinte lorsqu'il existe un enjeu médico-légal. L'histologie met en évidence une nécrose de l'épiderme.
Le syndrome de Stevens-Johnson est une urgence vitale et impose une hospitalisation dans un service adapté : service de dermatologie, unité de soins intensifs :
- Les personnes atteintes du syndrome de Lyell doivent être transférées dans des unités spécialisées pour les grands brûlés ou pour les maladies bulleuses.
- Le traitement médicamenteux incriminé doit être arrêté immédiatement. Le traitement est avant tout symptomatique : isolement pour prévenir le patient des infections, supplémentation nutritionnelle, remplissage vasculaire (perfusions), surveillance respiratoire, soins et antisepsie cutanée avec pansements non adhésifs.
- Certains traitements sont parfois utilisés mais leur efficacité demeure controversée : corticoïdes, immunoglobulines intraveineuses, immuno-modulateurs et immunosuppresseurs, plasmaphérèse.
- La nécrose cutanée s'étend pendant quelques jours puis se stabilise, par la suite, l'épiderme se régénère en 15 à 21 jours. La récupération des muqueuses est en revanche plus lente et peut prendre plusieurs mois.
- Le médicament en cause doit être formellement contre-indiqué chez la personne qui a présenté un syndrome de Stevens-Johnson.